Lxxx Potion. [Elrohir] [Quête Aléa]

Il n’est pas rare que le capitaine de la garde d’Imladris que je suis s’absente quelques temps pour une chasse à l’orc tout ce qu’il y a de plus personnelle. Cependant, il est bien plus rare que cette chasse à l’orc se déroule dans le but de défendre l’un des nombreux villages des hommes qui se trouvent à moins d’une demi-journée de chevauchée d’Imladris. Mon cheval blanc, Brume piaffe d’impatience en me voyant arriver, comme il déteste autant que moi les jours où je ne le chevaucherai pas. Rester enfermé ne convient pas plus à mon cheval qu’à moi-même. Autour de moi, les écuries sont emplies d’hommes qui préparent leurs chevaux et leurs armes, prêt à prendre place à ma suite pour se rendre à Esseas. Lorsque tout le monde est prêt, je grimpe sur le dos de Brume et je le lance au galop dans les rues de la cité, suivit presque immédiatement par mon équipe.

Il ne faut que quelques heures à ce rythme pour arriver à Esseas. La première chose que nous réalisons, c’est que les habitants ont plié bagage. On voit au loin, à l’est, un campement de fortune où doivent se trouver les survivants. J’y envoie la moitié de ma troupe aux nouvelles, et histoire de protéger un peu tout ce petit monde, avant d’entrer dans le village avec le reste. Il ne me faut pas longtemps pour réaliser que les orcs sont en train de retourner minutieusement chaque maison avant qu’ils ne nous repèrent, et le combat s’enclenche alors… Ma lame sort de son fourreau sans un bruit, et Brume se jette dans la mêlée comme il est formé pour le faire. Je tranche plusieurs têtes avant de devoir sauter au sol pour achever un orc qui m'a arraché mon épée des mains. Les minutes suivantes se perdent pour moi dans les parades et les coups d'estoc, sans que je ne réussisse à voir le bout du combat. C'est en ces moments là qu'Elladan me manque le plus. Notre style de combat tellement complémentaire me permet d'être au cœur de la mêlée tout en sachant qu'un archer veille sur moi, et que son œil perçant suit le moindre de mes mouvements.

Un premier ennemi se place devant moi, et Aranruth trouve immédiatement le chemin de son cœur, passant outre la cotte de maille qu’il porte. Eh ouais, j’ai une épée elfique, moi. Pas question de laisser quiconque tenter de me barrer le passage. Un second ennemi. J’esquive, puis je passe avec rapidité sous sa garde pour l’assommer avec le pommeau de mon épée. Un troisième se voit privé de sa tête. Cependant, les elfes sont moins nombreux que les orcs, et d’après ce que je vois, ils sont en train de fouiller chaque maison l’une après l’autre, et il est impossible pour nous de nous en sortir face à toutes ces créatures qui sortent de partout comme ça. Mon regard se pose sur Aranel et un sourire simultané monte à nos lèvres. Bien, on va s’amuser.

Un pas, un autre, une parade, des épées qui s’entrechoquent. On se fraye un passage dans la masse d’orcs qui semble totalement infinie, et on essaie d’éviter de trop se faire abîmer au passage. Y’a pas à dire, mais ce serait idiot de voir Elinà ou Valaina nous hurler dessus en rentrant, simplement parce qu’on a voulu sauver un village à moitié en flamme d’une bande d’orcs en train de le piller, alors que les habitants sont sains et saufs à quelques lieues de ça. Ouais, pour le coup, la chérie de mon frère et notre sœur de cœur nous aurait très légèrement tapé dessus avant de nous soigner.

Enfin, au bout d’un moment, Aranel et moi sommes obligés de nous battre dos à dos, pendant que mes archers sont montés en hauteur pour tenter de sauver nos peaux. Ouais, il est compliqué pour deux elfes, même avec leurs capacités supérieures à la normale de s’en sortir sans heurt.

- Aranel, trouée ?

Un râle répond à ma question. Et je sens l’elfe s’éloigner de mon dos. Je recule d’autant, et nous finissons par nous barricader dans une maison. Bon. Plus qu’à trouver un moyen de ressortir. Ou alors, vu que les lieux ont l’air à peu près intacts, tenter de trouver ce que cherchent les orcs ici, dans ce petit village.

A peine la porte refermée, je tape sur l’épaule de mon compagnon, un sourire jusqu’aux oreilles sur le visage. Celui-ci me regarde, un air désespéré sur le visage.
- C’est pas drôle, Elro. On n’en sortira jamais vivants.
- Mais si. L’autre groupe va venir s’occuper des orcs. On verra bien. Montons au premier, on pourra peut être sauter jusqu’à la maison voisine sans être vus.

Arnael hoche la tête, et finalement accepte de me suivre, non sans avoir ouvert rapidement les tiroirs, pour trouver ce magnifique objet mystérieux que cherchent les orcs par ici. Mais, la chance ne nous sourit pas, et nous arrivons au premier étage, où on ne trouve personne. La première fenêtre donne droit sur la rue, et je préfère, comme mon adjoint, m’éloigner vers une autre, sur l’arrière de la maison. Je sors sur la balustrade, rangeant mon épée, et j’attrape la gouttière pour me hisser sur le toit.

Après un juron qu’il vaut mieux ne pas répéter ici, Arnael me suit, et ensemble nous marchons sans un bruit sur le toit de la maison, avant de nous glisser dans la seconde. Dans la rue, les orcs sont en train de se faire décimer par les elfes, et ce spectacle me ravit. Un sourire monte à mes lèvres, et je saute sur la maison sur le côté, avant de me laisser couler dans une fenêtre du dernier étage. Là, encore une fois personne : les habitants ont déserté depuis longtemps, et il n’est pas possible pour moi de rester de marbre devant la chambre d’enfant qui se trouve devant moi. Non, vraiment, il n’est pas possible d’accepter que ces créatures continuent à faire du mal autour d’eux.

Nous descendons au rez de chaussez, puis nous sortons par la porte de derrière. Dans la rue, il y a bien trop d’orcs, et tous les deux, nous sommes partis pour tenter de faire quelque chose de bien plus amusant que de se battre contre les orcs, et puis, de toute façon : deux elfes de plus ou de moins ne changeront rien. La dernière fois que j’ai jeté un œil dehors, les elfes que j’avais envoyé voir les villageois avaient rejoint les lieux, et ils étaient accompagné d’humains, armés de lances et de fourches, et tout ce beau petit monde était en train de prendre l’avantage sur les orcs. Alors, oui, Arnael et moi pouvons nous amuser à aller voir autre chose, comme chercher cet objet étrange que recherchent les orcs. Une maison un peu plus grande que les autres attire mon attention et après un nouveau coup sur l’épaule d’Arnael, nous nous y dirigeons d’un même pas.

On s’immobilise tous les deux devant la maison, et on décide d’y entrer, au bout de quelques secondes. Ce doit être l’endroit où vit le maire de la ville, car il y a quelques dorures, un petit cabinet à l’entrée, bref. C’est un endroit qui voit passer du monde. A mon humble avis, le genre de demeure où on peut trouver des choses affreusement amusantes comme un recueil des secrets de la ville, ou encore des potins croustillants sur les habitants. Certainement que ça doit se voir sur mon visage, car je me prends une taloche sur le dos du crâne, et Arnael entre dans une des pièces en me faisant les gros yeux.

Oui, bon d’accord : c’est indigne du fils d’Elrond.

Laissant à mon ami le rez de chaussez, je grimpe à l’étage, et ouvre les portes une à une, cherchant un indice, ou quelque chose qui me permettrait de trouver ce que je recherche. Pourtant, rien n’y fait, aucune des pièces ne m’inspire. Ici, une chambre d’enfant, là une chambre d’adulte. Bref, il n’y a rien d’intéressant, alors, je me laisse glisser le long de la rampe, et j’ouvre la première porte, découvrant de l’autre côté un escalier qui descend vers une cave. Tient, c’est rare ça, une cave dans une demeure comme ça. J’y descend rapidement, et découvre une sorte d’atelier d’alchimiste, où des potions sont disposées contre un mur, sur des étagères en bois épais. Je m’en approche, observant les formes des flacons et leurs couleurs, avant de m’éloigner pour me pencher sur le matériel d’alchimiste.

Voilà une matière que j’aurais aimé apprendre, si j’avais été capable de la patience qu’il faut pour mélanger les liquides et les poudres, d’attendre le temps qu’il faut pour porter à ébullition le mélange, puis de le faire refroidir. Alors, oui, c’était une bonne idée, ce laboratoire. Mais, moi, je ne suis pas quelqu’un de patient, alors… Je ne suis pas tout à fait certain qu’apprendre tout ça soit une bonne idée, pour moi. Si c’est comme pour mon talent de cuisine… Quoi qu’il en soit, rien que ce laboratoire vaut une fortune, et si c’est ça que recherchent les orcs… Eh bien, croyez moi : il n’y a pas à chercher avec autant d’ardeur. C’est quand même assez flagrant comme truc !

- Arnael ! Ramène ton gros cul d'elfe en bas.

- Ho… Sympa ton truc.

Mon regard se porte sur mon ami et un sourire monte à mes lèvres. Hey ouais, c’est sympa. J’attrape une potion, et je la secoue légèrement. Elle m’explose alors à la figure, et le bruit assourdissant me fait porter la main à mes oreilles. Arnael s’approche de moi, visiblement inquiet, et je vois ses lèvres bouger, encore et encore, sans comprendre ce qu’il me dit. Je porte la main à mon oreille et secoue la tête, avant de lever les mains face à mon ami.

- Je ne t’entends plus.

Il lève les yeux au ciel, et je lui réponds pas un sourire amusé. Ouais, bon, la prochaine fois je ne secouerai pas l’objet que je trouve comme ça. Ignorant les gestes d’Arnael qui me fait signe de monter pour ressortir, je continue à examiner les potions, jusqu’à trouver enfin une potion à l’étrange couleur rosée que je finis par attraper, en guise de trophée.

- MON PÈRE SAURA PEUT ËTRE CE QUE C’EST

Machinalement, cette fois je crie, vu que j’essaie de m’entendre un peu. Enfin, c’est pas possible : je suis désormais sourd. Nous remontons, et nous découvrons dehors que tout est vide et mort. Il n’y a plus que nos elfes, qui sont en train d’entasser les cadavres des orcs pour les brûler. Je vois Arnael esquisser quelques gestes, et on nous apporte nos chevaux assez rapidement, pour que nous rentrions à Imladris pour soigner mes oreilles.