LIRRINA TYL + end

Ma vie n’est pas très palpitante à raconter, ou peut-être l’est-elle finalement, je crois que je ne la vois pas de la même manière que les autres… Pour moi, tout est normal, rien ne sort de l’ordinaire dans mon existence presque casanière, alors qu’à y regarder de plus près on peut aisément affirmer qu’il y a quelque chose d’assez peu commun dans ma famille. Pour cause, vous voyez ce vieux semi-homme barbu et imposant? Hé bien c’est mon père, Solroc Tyl, oui, je sais, on peut dire que la ressemblance entre nous n’est pas vraiment frappante, il faut dire qu’il est un Hobbit et que je suis une elfe, on peut difficilement faire plus opposé que cela, et pourtant, c’est bel et bien lui qui m’a élevé… Enfin non… En fait, c’est son grand-père qui m’a élevée en premier… Puis son père… et maintenant lui… Est-il donc davantage mon neveu que mon père?…. Tout ça me semble fort compliqué, je dirais simplement qu’il y a longtemps, une première génération de Tyl m’a recueillie, je n’étais qu’une petite elfe trouvé aux abords d’une rivière, trempée, frigorifiée et surtout blessée… La seule chose dont je me souviens de ce temps-là, c’est une attaque, furtive, brutal et éclair, dont je fus la seule rescapée, sauvé par les eaux et emporté jusqu’à une nouvelle destinée, loin des miens, ou en tout cas loin des membres de ma race. C’est un certain Biroc Tyl qui me trouva, avec son épouse, Driolelle. Ils avaient déjà un fils à ce moment-là, un fils plutôt jeune et je crois qu’ils se sont simplement prit d’affection pour moi et à cette époque j’avais besoin de bras rassurant. Nous nous retrouvions tous dans cette situation, qui a perduré encore longtemps. Ils sont devenus mes parents, tout simplement, même si il était difficile de me prendre réellement pour leur enfant, surtout une fois devenue adulte, mais ça ne gênait pas les habitants de notre petit village, j’étais un peu leur petit secret à tous, la petite elfe perdu, devenu Hobbit par amour d’une nouvelle famille, d’une nouvelle vie. On ne quittait pas beaucoup nos terres à l’époque, je crois que tout le monde avait peur que des elfes viennent me récupérer un jour, sans crier gare, on me cachait presque, aux yeux du monde, aux yeux des Hobbits étrangers, aux yeux de tous. Ça ne me gênait pas, au contraire, je détestais l’idée de me retrouver un jour au sein d’une communauté d’Elfes, personne ne m’a jamais dit de mal d’eux, toutefois, je ne pouvais m’empêcher de les imaginer orgueilleux et vindicatifs, surement parce que je l’étais moi-même un peu… Enfin, j’ai grandi, mais j’ai cessé de vieillir, contrairement à cette famille qui m’avait élevée… Mon frère, Larin, a toujours été un second père pour moi, alors lorsque Biroc est mort, il l’a naturellement remplacé, d’une certaine façon. J’étais encore un jeune elfe, ou plutôt, je n’avais pas beaucoup envie de grandir et mon apparence parfois juvénile m’aidait à croire que des deux, j’étais la plus jeune et celle ayant le plus besoin d’un père protecteur. C’est avec Larin que nous avons commencé à prospecter, il a compris que je ne pouvais continuer à être enfermée dans notre village, alors il m’a offert la liberté, tout en restant à mes côtés, surement conscient que je ne saurais capable de me débrouiller seule. Si vous avez bien tout suivi, la suite ne vous surprendra guerre, Larin c’est marié et à mis monde Solroc, l’homme que j’appelle actuellement Père. Cela peut paraitre étrange et difficile à comprendre, toutefois, je n’ai jamais pu concevoir de vivre sans être la fille de qui que ce soit, je ne me sens pas prête à être l’ainée, l’adulte aux sages paroles, bien qu’il m’arrive d’en dire de temps à autres, je préfère jouer ce rôle-là, car il me va mieux et tout le monde s’y complait.

Je me rends compte à quel point les choses peuvent paraitre confuse dit comme ça… J’aurais simplement du affirmer que j’ai été élevée par des Hobbits, presque en secret, et que je n’ai jamais connus la vie d’une vrai elfe. Oui, ainsi ça me semble tout de même plus clair. Enfin, Solroc est donc mon père et Lanla, ma chère et tendre mère. Depuis que nous voyageons, je cache ma nature, autant que faire ce peut, bizarrement, je suis bien plus petite que la majorité des Elfes que j’ai pu croiser au cours de mon existence… Peut-être qu’être petit, c’est contagieux et qu'à force de côtoyer des semi-hommes je suis devenue... une semi-elfe?… Je l’ignore, quoi qu’il en soit, on ne me prend pas toujours pour une elfe, je cache mes chères petites oreilles et j’essaie de simplement passer pour une humaine, préférant nier mes origines que de m‘en vanter… Je dois d’ailleurs admettre que spontanément, il m’arrive parfois de dire que je suis une Hobbit et de m'y tenir, trop têtue pour admettre que j'ai fatalement tort… Cependant, malgré tous mes efforts personne ne me croit jamais, allez savoir pourquoi. Je préfère être honnête, je déteste être une elfe… Je ne hais pas les elfes, ils sont majestueux, ils nous font rêver, ils sont beaux, bref, ce sont des elfes, mais physiquement, je n’ai pas envie d’être comme eux. Pour moi, la beauté, c’est être petit et barbu… Je ne veux pas être barbu bien sûr… mais je ne veux pas être plus grande que tous les gens que j’aime, ni avoir de grandes oreilles pointues et ridicules… Sans parler de mes cheveux, personne n’a les cheveux aussi clairs, je veux des cheveux sombres comme ceux de ma mère adoptive ou roux, comme ceux de ma première mère adoptive -et voilà que mon histoire recommence à devenir incompréhensible…- . Je crois que c’est pour cela que je suis si susceptible au sujet de mes origines, je n’aime pas en parler, car j’ai été élevée d’une autre façon que les autres elfes, je n’aime pas les mêmes choses, je ne vois pas le monde de la même manière et cela m’agace tellement de savoir que mon apparence reflète tout, sauf celle que je suis vraiment, celle que je veux être. Et puis entre nous, les elfes sont beaucoup trop coincés, le peu d’elfes que j’ai rencontrés… ils semblaient porter le fardeau du monde sur leurs épaules, ils sourient peu et semble si hautain… Je ne veux pas être ainsi et il est hors de question que j’épouse un jour un elfe comme me le conseille mon père, j’épouserais un Hobbit ou un nain, à la rigueur, mais surement pas un grand oreille pointue.

Enfin, avec les Tyl, nous parcourons les terres du milieu, de village en village, prospectant à travers les montagnes et les forêts dans l’espoir d’y trouver des objets intéressants que l’ont peut par la suite revendre. Nous jouons aussi parfois les messagers, tout est bon pour gagner de quoi survivre. J’aime cette vie, cette existence qui me permet de voyager, de ne jamais m’attarder et de découvrir un monde que j’ai si longtemps dû fuir et qui m‘a fait, dans les premières années de ma vie, tant de mal. C'est une revanche en un sens. Malgré tout, j’ai conscience que mes « parents » me suivent uniquement par amour et non par réelle envie, ils sont avant tout des Hobbits, plutôt casaniers et n’aimant pas se mêler des affaires du monde, mais pour moi, ils font l’effort, et ce, depuis deux générations maintenant. Cette vérité m’apparait plus clairement depuis quelque temps, rendant nos périples moins gratifiants à mes yeux… J’aimerais avoir le courage de m’en aller, de vivre seule sur les terres du milieu, ou alors de retourner dans notre village avec eux pour y vivre telles des Hobbits, sans aventures ni surprise, simplement pour leur faire plaisir, sacrifiant mes envies comme eux le font depuis tant d’années pour moi… Malheureusement, je n’y arrive pas, surement n’ais-je pas assez de volonté pour me retrouver seule ou au contraire pour être étouffé par des habitudes et une vie bien tranquille. Tout se bouscule dans mon esprit, mon cœur semble gagner en sagesse à présent, mais aussi en mélancolie, car comprendre que l’ont est la cause de la souffrance secrète des gens qu’on aime, ce n’est pas vraiment le meilleur moyen d’être heureux, surtout pas lorsqu’on comprend que le courage de changer les choses nous manque… Je suis perdue entre ce besoin de vivre libre et ce devoir de payer la dette que je dois aux Tyl. Ils sont ma famille et ont sacrifié leurs vies pour mon bonheur, je devrais en faire autant et ne pas parvenir à faire ce choix qui devrait être si naturel me désole et me tue presque à petit feu, comme si ma vie décider de s’échapper de mon corps plutôt que de faire ce choix si crucial...