La reine rouge
Il était un monde où la magie avait besoin des rêves et des peurs de l’homme pour survivre. Il était un équilibre qui un jour fut bouleversé. Et, il était un bois dans lequel vivait la dernière créature née de la magie en ce monde. A sa mort, tout disparaitrait.
Sombres, distordus, les arbres s’étalaient comme un découpage d’ombres chinoises sur la pleine lune. Plus personne n’allait dans cette forêt. Il y a longtemps, on racontait qu’une bête sauvage y vivait et dévorait tous ceux qui s’y risquaient. Le temps passa, et toutes les histoires furent oubliées, effacées des mémoires. Seule la peur, presque irrationnelle était restée : nul ne devait jouer avec la magie, nul ne devait s’approcher de la forêt. Une vieille dame s’y aventura pour ramasser des champignons, bravant ainsi la tradition. Elle ne revint jamais et son corps ne fut pas retrouvé.
Son fils, baigné par son père depuis sa plus tendre enfance dans la haine de la magie et des anciennes créatures, tenta de rappeler à tous les légendes. Il voulut les avertir du retour de la Magie. Mais, ses compatriotes avaient l’esprit trop fermé pour envisager que tout cela ait réellement existé. Il passa pour fou et sa famille fut isolée. Les sobriquets et les rumeurs finirent par s’estomper avec l’agrandissement du village qui devint une jolie petite bourgade moyenâgeuse, avec ses rues pavées et son marché à découvert. Il finit par se marier avec une jeune fille qui partageait ses croyances. Lorsque sa femme mit au monde une petite fille, ils tentèrent par tous les moyens d’assurer sa protection car leur maison était proche du lieu maudit. Mais l’enfant n’écoutait jamais ce qu’on lui disait et l’isolement forcé qu’elle subissait lui pesait. D’un côté, nul ne voulait être ami avec la fille d’un fou, et de l’autre, ses parents la surprotégeaient et la surveillaient sans cesse.
D’autres années passèrent. L’enfant d’hier était devenue une belle jeune fille. Elle avait de longs cheveux blonds comme les blés, de grands yeux bleus innocents qui faisaient tourner toutes les têtes. De flirts en amourettes, chacun se battait pour s’arracher ses charmes. Mais au-delà de l’innocente séduction, jamais elle ne laissait quiconque approcher de trop près, ce qui lui valait le respect de ses peu nombreux amis.
Un soir, alors qu’elle rentrait chez elle après le bal de la Saint Jean, l’aura d’un drame à venir se répandit autour d’elle. Elle avait eu dix-huit ans quelques semaines plus tôt : l’âge de raison, comme on dit. Cependant c’est avec insouciance qu’elle qu’avançait dans les ruelles sombres sans se préoccuper des ombres menaçantes derrière elle. Sa maison se trouvait à quelques rues de là, non loin de la forêt hantée. Elle était suivie, mais l’alcool altérait ses sens et elle ne pensa pas une seule seconde à se retourner. Elle fredonnait en sautillant sur le trottoir. Tournant dans une ruelle pour prendre un raccourci, elle jeta un regard par-dessus son épaule et comprit enfin le danger auquel elle s’exposait. Cependant, elle ne sembla pas s’en inquiéter. Elle fit un petit signe de la main aux trois jeunes hommes dans son dos.
Soudainement dégrisée, un rictus déchira ses lèvres pulpeuses. Tout en riant, elle les entraîna dans recoins ténébreux d’une allée, sa pèlerine rouge virevoltant autour d’elle. Une brume qui tombait sur la ville rendait la vision difficile. Les trois garçons la suivirent sans se presser tant ils étaient sûrs d’eux. Seul l’un d’entre eux, aux boucles châtain et au visage juvénile, semblait de plus en plus mal à l’aise au fur et à mesure qu’ils avançaient. Il jetait de nombreux regards autour de lui, comme pour tenter de percer les sombres secrets de la nuit. Le second avait une crinière brune et, porté par son arrogance, s’aventurait presque sans peur dans la vapeur ambiante. Le blond hésitait mais ne pouvait laisser son angoisse l’emporter, par fierté.
Pétillante, la jeune fille se mit à chanter d’une voix claire et pure :
Promenons-nous dans les bois
Elle grimpa sur l’un des gros cailloux décoratifs qui bordaient le chemin et éleva ses bras vers le ciel, telle une offrande à la lune masquée, sous le regard surpris des trois pisteurs. Des frémissements surnaturels s’élevaient dans l’air.
Pendant que le loup n'y est pas
Elle sauta sur la pierre suivante et rétablit son équilibre après quelques vacillements. Elle tournoya sur un pied et envoya un baiser au plus jeune des trois qui commençait à trembler d’épouvante.
Si le loup y était
Un nouveau bond l’amena sur un petit poteau noir. Elle leva une de ses jambes au niveau de son genou et fit une pirouette de danseuse. Sa courte jupe noire se souleva et laissa entrevoir une culotte de dentelle rouge. Le jeune homme aux cheveux châtain s’arrêta et ramena ses bras autour de son torse.
Il nous man-ge-rait
Elle se laissa tomber sur le sol, ses bottines brunes claquant brièvement dans le silence de la nuit. La vue des arbres tétanisait le troisième. Les deux autres avançaient sans se préoccuper de leur ami.
Mais comme il n'y est pas
Elle se retourna et fit signe aux garçons de la suivre vers la forêt qui se dressait devant eux. L’adolescent apeuré fit demi-tour et s’enfuit en courant. Ses camarades rirent un instant de sa couardise.
Il n'nous mangera pas
Elle écarta les bras et avança en titubant volontairement pour montrer à quel point elle était une proie facile. Sous sa capuche, son beau visage était pourtant redevenu sérieux. C’est avec application qu’elle prononça les derniers mots de l’incantation :
Loup y es-tu ? Entends-tu ? Que fais-tu ?
Brun accéléra pour rattraper l’inconnue, subitement agacé par cette pseudo course poursuite. Il l’agrippa par le bras puis la plaqua contre le mur. Tenue aux épaules, la jeune fille ne montra aucun affolement. Au contraire, elle éclata de rire et un son cristallin s’éleva dans l’air frais de la nuit. Etonnamment, ce fut cette sonorité si pure qui glaça les deux garçons jusqu’à la moelle. Quelque chose clochait : rires et sérénité n’étaient pas une réaction considérée comme normal pour une jeune fille seule et face à deux garçons aux intentions pour le moins mauvaises. Pour la faire taire, le jeune homme l’embrassa à pleine bouche et sortit un couteau de sa poche. Il trancha la lanière qui retenait le corset noir de la jeune fille. Le couteau glissa lentement sur les différentes cordelettes, les coupant les unes après les autres. Une fois la dernière libérée, le haut glissa lentement jusqu’au sol.
Dès qu’il libéra les lèvres de la jeune fille, celle-ci rit à nouveau. Cette fois, Brun fut agacé. Elle pencha la tête, et murmura :
– Le loup te prendra.
Il eut un rictus mauvais et laissa glisser sa main vers le sein jeune et ferme de la jeune fille.
– Et il est où, ton loup ?
Sa main descendit sur le ventre et remonta le long des hanches. Elle se cambra lorsqu’il toucha une zone érogène, mais son regard restait sûr et serein.
-Pas loin.
Brun commença à douter de la fin de cette soirée.
– Me voilà.... me voilà, répondit une voix rauque dans son dos.
Surpris, il fit un bond en arrière, libérant la jeune fille. Une énorme bête se trouvait à quelques pas de lui. Sous l’effet de la surprise, il tomba à genoux sur le sol. La jeune inconnue se dirigea vers l’imposant canidé sans montrer la moindre hésitation. Elle ne se préoccupait pas non plus de sa semi-nudité. Elle fit une pirouette et enlaça son loup. La tête de la bête lui arrivait à l’épaule. Elle posa tendrement sa tête à la base du cou puis tendit la main pour lui caresser l’oreille. Une nouvelle incantation s’imposait afin de respecter les Rituels.
– Loup, comme tu as de grandes oreilles.
– C’est pour mieux entendre ton appel, Chaperon.
La main de la jeune fille glissa sur la joue du loup et joua avec les poils noirs et drus.
– Loup, comme tu as de grands yeux.
Blond, soudainement terrorisé, recula de quelques pas, ne pouvant détacher le regard du monstre qui se trouvait face à lui. Les histoires de la bête de la forêt étaient donc vraies. Et cette fille semblait commander cette chose affreuse. Il se retourna et se mit à courir.
– C’est pour mieux voir les proies que tu me désignes, Chaperon.
Elle virevolta sur elle-même en riant tandis que le loup se précipitait à la poursuite du garçon qui n’avait aucune chance de s’en sortir vivant. Les muscles puissants de l’animal lui permirent de rattraper le jeune homme et de le plaquer au sol.
– Loup, comme tu as de grandes dents.
La chair du jouvenceau se déchira sous la pression des crocs acérés de l’animal. Le sang gicla sur le sol. Mis à part la respiration saccadée du Brun, c’étaient les seuls bruits qui rompaient le silence de la nuit. Au moment où il eut rassemblé assez de courage pour s’enfuir, Brun tenta de se relever. Mais, une lame, celle de son propre couteau, se posa sur sa gorge.
– Non, non, non ! J’ai faim de ta chair, Brun.
Brun se mit à trembler et Chaperon reprit après quelques secondes :
– Ceux qui posent la main sur le Portail sont dévorés par son Protecteur. Tu m’as touchée et maintenant tu dois en payer le prix. C’est dommage pour toi, je n’avais pas prévu de massacre ce soir.
La voix de la jeune fille montrait sa déception, mais ces paroles montraient qu’elle se moquait de lui. Sa voix trembla lorsque les mots des Anciens naquirent sur ses lèvres.
– Folle que tu es de jouer avec la Magie. Tes grands parents ne t’ont donc pas raconté à quel point la vie était invivable à l’époque où elle régnait sur notre monde ?
– Bien sûr que si. Mais sans la Magie, notre monde ne peut survivre. Ne s’appelle-t-il pas « le Pays des Contes de Fée » ? Et, les fées ne sont-elles pas des créatures de la Magie ?
Cette réflexion lourde de sens fit taire Garçon. De toute façon, sa bravoure était repartie au moment où le poignard s’était posé sur sa carotide. La fille semblait savoir ce qu’elle faisait car sa poigne était ferme. Il était conscient de n’avoir pas la moindre possibilité de rentrer chez lui en vie ce soir. Tout ça pour avoir simplement eu envie de forcer une fille anonyme à entrer dans son lit. Quelle déveine. Forcé de regarder son ami se faire dévorer, il décida d’au moins l’honorer en ne détournant pas le regard.
Pourtant, l’horreur de la situation lui apparaissait pleinement. L’animal déchirait les chairs en tirant dessus d’un coup de tête brutal. Il mâchait lentement, son regard posé sur Brun comme pour lui indiquer qu’il était le prochain sur sa liste. Lorsqu’il n’y eut plus de chair à dévorer, le monstre joua un instant avec un os : il le rongea un peu puis le brisa avec force.
Abandonnant les restes ensanglantés, Loup se dirigea vers Brun en léchant ses babines. On aurait dit qu’il prenait volontairement son temps. Chaperon jouait avec le couteau sur le cou du jeune homme tout en suivant des yeux avec un air ennuyé les actions de son familier. Une fois Loup suffisamment proche, elle s’écarta afin de lui laisser le champ libre. Ses rires emplissaient la ruelle, faisant reculer l’ombre. Une lumière rouge pulsait autour de Loup et de sa Maîtresse. Le sang l’arrosait, souillant sa jupe, mais perdue dans la folie du rituel, elle ne s’en rendait pas compte. Loup dévora lentement Brun tout en tâchant de le garder vivant le plus longtemps possible. Le jeune homme hurlait éperdument dans la nuit. Mais personne ne pouvait l’entendre car la magie de Chaperon se répandait autour d’eux. Finalement, agacé par les cris de terreur et de douleur de Garçon, Loup plongea sa gueule dans la poitrine pour y chercher le cœur. Dans le renouveau du silence nocturne, il répondit de sa voix rauque :
– C’est pour mieux savourer les proies que tu me choisis, Chaperon.
Chaperon laissa un sourire enfantin déchirer ses lèvres. Suivie de Loup, elle se dirigea vers les bois, abandonnant les restes ensanglantés des deux jeunes hommes. Elle semblait glisser sur le chemin sombre. Le bruit de ses pas était si ténu qu’il fallait tendre l’oreille pour arriver à le distinguer. Les arbres se dressaient autour d’elle, mais elle ne les voyait pas comme des ennemis. Pour elle, tout ce qui avait trait à la Magie était enchanteur. Elle contourna un dernier chêne et sa cabane se dressa alors devant elle. Elle entra sans hésitation.
Dans un crissement d’os et un déchirement de muscles, Loup reprit sa forme humaine. Le lien qui liait l’enfant au loup avait permis non seulement la communication entre eux, mais aussi le changement de forme de l’animal à l’homme. Loup était devenu le garde du corps de l’enfant qui, tant d’années auparavant, avait vu son destin modifié par les pouvoirs d’une sorcière mourante. Il resta à genoux devant la cabane le temps de reprendre son souffle. Sa transformation était systématiquement douloureuse.
Lorsqu’il entra dans la pièce, Chaperon avait allumé un feu et était allongée sur le lit. Elle avait laissé sa pelisse sur une chaise. À moitié nue, elle leva les bras vers le ciel et tourna la tête vers Loup.
– Tu as failli arriver en retard, Loup.
Le jeune homme s’approcha d’elle et fit rouler les muscles de son nouveau corps afin de s’y habituer.
– Tu m’as appelé en retard, pour commencer.
Elle s’assit, son beau visage déformé par un rictus de haine et de dégoût.
– J’avais bu.
Loup sourit, dévoilant ses dents bien plus acérées que celles d’un humain et laissa échapper un petit gloussement. Elle se laissa retomber sur le dos d’un air boudeur tout en secouant la tête.
– Je voulais voir ce que ça faisait de briser un interdit de plus. Et c’est désagréable. J’ai la nausée et mal au crâne. Et j’ai failli tout faire rater.
Loup s’assit sur le bord du lit et lui caressa les cheveux.
– À chaque fois tu te fais avoir, Chaperon. Pourquoi ne pas décider d’obéir pour une fois ?
– Je ne t’aurais pas rencontré si j’avais obéi.
– En effet.
Elle tira sur le bras de Loup qui se laissa docilement tomber à côté d’elle et l’enlaça. L’homme lui rendit son étreinte et baisa ses cheveux.
– C’est demain.
L’énoncé de la date limite le fit frissonner. « Demain », c’était le treizième anniversaire de leur rencontre. « Demain », serait le jour où leur union allait apporter le chaos sur cette ville et la faire sombrer sous le joug des contes pour enfants, dans leur version originale et sanglante. « Demain », l’expansion des Hommes s’arrêterait et la Magie reprendrait ses droits.
– Oui. Enfin, répondit-il.
Elle se tourna vers lui et lui offrit ses lèvres, qu’il prit avec joie. La main de l’homme glissa le long de la hanche de sa Maîtresse. Celle-ci s’agrippa à ses épaules et griffa son dos. Comme à chaque fois, leur étreinte faillit déraper. L’un comme l’autre comprenaient l’absolue nécessité de garder la virginité de la jeune fille pour le Rituel. L’exploration mutuelle de leur corps menait à des jeux auxquels il était difficile de ne pas succomber. Avec regret, Chaperon finit par s’arracher à la douceur des caresses de Loup et se rhabilla pour rentrer cher elle, laissant Loup à sa solitude. La comédie qu’elle devait jouer chaque jour auprès de sa famille et de ses amis allait l’épuiser une toute dernière fois. Après, ce serait terminé. Elle serait devenue le Portail, la Reine qui relirait les deux aspects de la Magie. Dès le lendemain soir, elle n’aurait plus jamais le moindre contact avec les Hommes. C’était un maigre prix à payer à ses yeux, vu à quel point ceux-ci lui semblaient fades et ternes par rapport à la beauté et la puissance de la Magie.
La journée lui parut interminable. D’abord, ses cours où elle était une anonyme de plus, une jolie fille qui ne se liait pratiquement pas. Les cours de couture et de cuisine lui parurent encore plus longs qu’à l’ordinaire. Quant à celui sur les tâches ménagères, elle ne pouvait s’empêcher de jeter de fréquents coups d’œil par la fenêtre, guettant la chute du soleil derrière la cime des arbres. Arriva alors le repas familial. Elle trépignait d’impatience, elle bouillait à l’intérieur. Dès que le soleil laissa place à la lune dans le ciel, elle reprit le chemin de la masure. Elle s’était apprêtée pour l’occasion d’un corset noir et d’une jupe volante blanche. Elle avait coiffé avec soin ses longs cheveux et mis un peu de rouge sur ses joues et ses lèvres. Dans le miroir, elle s’était trouvée belle. Emmitouflée dans sa cape rouge, elle avançait sur le chemin qui semblait s’étirer à l’infini. Elle restait imperméable aux conseils que son père lui avait prodigués suite à la mort tragique de deux inconnus. S’il savait qu’elle en était l’instigatrice…
Loup l’attendait sur le pas de la porte. Il avait passé la journée à nettoyer l’endroit et à préparer les ingrédients du rituel. Sur le sol, de la bruyère fraîche emplissait la pièce d’une douce odeur. De grosses bougies blanches éclairaient les murs d’une lueur dorée tremblotante. Au centre d’une petite table ronde, des pots contenant des herbes et des poudres magiques entouraient un calice en or blanc. À côté de la coupe était posé un couteau au manche ouvragé.
Guidée par son ami, Chaperon enleva sa pèlerine et la posa sur l’une des chaises. La jeune fille leva les yeux vers son compagnon, soudain intimidée par l’importance du moment. L’intérieur de la cabane ressemblait tant à ce qu’il était lors de sa toute première visite, que les souvenirs de la soirée avec la sorcière de la forêt lui revinrent en mémoire.
Elle avait cinq ans à l’époque, et déjà elle était têtue et possédait un caractère bien arrêté. La forêt l’attirait encore et encore, mais la paranoïa de son père la coinçait à la maison. Alors, un soir, par pur esprit de contradiction – et surtout pour prouver que le danger n’existait pas – elle était sortie par la fenêtre de sa chambre, située au rez-de-chaussée. Tout d’abord, l’expédition lui avait paru amusante. Puis, le froid et les ombres aidant, la peur avait pris le dessus. Un craquement. Un hululement. Le bruit du vent dans les branches décharnées. Et finalement, au milieu de la nuit noire, une lumière rassurante était apparue l’attirant irrémédiablement, une bougie sur la fenêtre de la masure.
Elle était entrée et avait trouvé une vieille femme allongée sur le lit. La vieille, malade et fatiguée, avait d’abord pris le chaperon pour un mirage. Mais, voyant l’enfant déplacer une bougie, l’ancêtre avait réalisé qu’elle était réelle. Et en découvrant le nom de famille de la petite, elle avait compris qu’elle était sa descendante directe, et donc qu’elle hériterait des pouvoirs nécessaires pour sauver la Magie. Se sachant en fin de vie, Grand Mère avait choisi de transmettre ses pouvoirs à la petite, afin d’assurer son potentiel magique. Elle avait fait d’elle la dépositaire d’une prophétie longtemps enfouie. Mais, à son âge, l’enfant était trop jeune pour arriver à imprégner son esprit de l’importance de sa nouvelle tâche. La moindre dérive au Plan des créatures magiques, et tout risquait de s’effondrer. Alors, l’aïeule avait écrit une très longue lettre expliquant de façon claire quelle besogne il lui fallait accomplir et à quelle date.
Sans magie, le monde s’auto détruirait. Et la forêt, qui était le dernier rempart, le dernier endroit du pays des contes de fées où la Magie régnait était aussi le lieu où une ultime créature magique vivait. L’être humain avait détruit tout le reste en oubliant petit à petit les histoires de leurs aînés. Au cours des siècles, la magie avait reflué, les créatures féeriques avaient perdu leur substance pour devenir de simples souvenirs effacés. La magie dépendait autant des Hommes que ceux-ci avaient besoin d’elle pour survivre.
Si un rituel très précis n’était pas effectué, la Magie disparaîtrait pour toujours du monde. Cette nuit-là, la sorcière avait utilisé ses dernières ressources pour lier la vie de la petite fille avec celle du dernier loup-garou. Celui-ci assurerait la protection de l’enfant durant toute sa vie et veillerait qu’elle apprenne le savoir contenu dans les grimoires magiques de la défunte, pour pouvoir effectuer à la date prévue, treize ans jour pour jour après cette rencontre, la cérémonie en question.
Et, ce soir-là, c’était enfin l’anniversaire de cette rencontre, c’était le moment où le monde se remettrait à tourner rond. Loup comme Chaperon étaient presque soulagés de voir l’échéance arriver après tant de répétitions et de travail. Le rituel de sang allait faire renaître les monstres et les démons qui peuplaient la contrée tant de temps auparavant. Les cauchemars allaient à nouveau régner sur le royaume aux côtés des pouvoirs bienveillants des fées. Puis, un rituel de luxure allait redonner leur substance aux êtres magiques.
Au départ, Chaperon devait redonner vie à toutes les créatures. Mais, avec les années, elle avait compris qu’elle pourrait choisir. Et elle avait choisi de transformer le pays des contes de fée en un monde d’horreur et de luxure. Elle ne savait pas qui, ou quoi l’avait poussée à devenir malfaisante : mais telle semblait être sa destinée.
La solennité du moment rendait Chaperon anxieuse. Son regard allait du couteau au calice, puis se posait quelques secondes sur les pots d’herbes. Lentement, elle s’assit et attendit que Loup fasse de même de l’autre côté de la table. Les gestes qu’elle avait répétés maintes et maintes fois au fil des années, créant ainsi des automatismes, lui permirent de conserver son calme. Après une profonde inspiration, elle prit chaque pot l’un après l’autre et versa dans le calice une pincée de celui-ci, deux de celui-là et un soupçon de ce dernier. Puis elle tendit les mains et prit celles de Loup et commença à réciter la première partie du sortilège. Loup posa ses mains humaines dans celle de la jeune fille. Autour d’eux, des fantômes apparaissaient au son de l’appel prononcé dans l’ancienne langue féerique. Bientôt, la cabane fut trop petite pour tous les contenir : sorcières, loups garous, ogres, orques, monstres de sous le lit formaient avec les fées, les elfes et les lutins une longue spirale qui sortait dans la forêt et s’enroulait autour du centre névralgique de la Magie.
Les spectres du passé semblaient revenir un peu plus à la vie à chaque mot. De simples ombres translucides, ils prenaient des couleurs et devenaient plus réels, plus tangibles, presque palpables. La formule magique prit des airs de chanson et la voix de Loup vint se joindre à la psalmodie de Chaperon. Une brise aux senteurs épicées emplit la cabane, faisant vibrer la flamme des bougies.
Des notes de musique et des sons de clochettes tintaient au rythme du chant et l’impatience des esprits devenait de plus en plus visible. Ils vibraient et oscillaient sur la cadence de la litanie. Finalement Chaperon pressa la main de Loup et la lâcha. Elle saisit le manche de nacre et d’or du couteau. Arrivait enfin le moment qu’elle appréhendait le plus. Sans cesser de fredonner, elle trancha la paume de la main de Loup au-dessus du calice qui se mit à trembler. Puis, elle joignit son propre sang à la préparation. Un coup de tonnerre retentit au moment où une flamme embrasait la mixture. La pluie s’abattit sur la forêt tandis que les éléments se déchaînaient : la fine brise devint bourrasque, puis s’amplifia encore. La bruine se changea en déluge. Les branches des arbres criaient pour finalement se casser, envoyant leurs ramages aux alentours, tels des projectiles lancés à pleine vitesse.
Pendant ce temps, dans la petite salle des fêtes de la ville, le père de Chaperon tenait un discours à ses compatriotes. La découverte des cadavres des deux jeunes hommes tués la veille avait ému toute la population, d’autant plus que l’incompréhension planait. Nul ne parvenait à trouver d’explication à ces meurtres sanglants, aucune bête sauvage connue n’était capable d’un tel massacre. C’était lui qui s’était porté au-devant de ses compatriotes et avait prit la parole afin de rappeler au bon souvenir de tous certaines des histoires d’autrefois. Enfin leurs esprits se réveillaient, enfin les anciennes peurs revenaient. À force de mots justement trouvés, il réussit à mettre du courage dans le cœur des maris, des fils, des frères et des pères. Il les poussa à la Chasse. Pendant que les femmes fabriquaient des torches, ils ressortaient des greniers et des hangars leurs fusils, leurs faux et leurs fourches. La force insufflée par le Chasseur gonflait de courage les hommes. Tous se rassemblèrent devant l’orée de la forêt pour un dernier discours d’encouragement
La tempête approchait, mais n’avait pas encore atteint l’orée de la forêt. C’est ainsi que les hommes partirent en chasse contre leurs propres peurs sous le regard inquiet de leurs femmes, de leurs filles, de leurs sœurs et de leurs mères. Certaines étaient sûres de ne plus revoir l’être aimé. D’autres avaient simplement peur qu’on leur rapporte la nouvelle d’une disparition, ou d’un autre meurtre. L’air était chargé d’électricité, ce qui rendait la tension presque insupportable. Les hommes disparurent sous les hauts arbres décharnés. Très lentement, les femmes tournèrent le dos à la forêt tout en s’emmitouflant dans leurs châles. Elles allèrent attendre auprès du feu le retour du Chasseur et de ses compagnons.
C’est à ce moment que la première partie du Rituel de Chaperon prit fin. Dans une dernière bourrasque, toutes les bougies s’éteignirent. Seul le feu de cheminée éclairait encore la pièce. La litanie se tut et seul le murmure des créatures venait troubler l’accalmie passagère. Loup banda la main de sa Maîtresse. Sa plaie à lui s’était déjà refermée grâce à ses pouvoirs magiques. La seconde partie de la cérémonie pouvait commencer. Chaperon allait devoir offrir sa virginité à la magie et, par là même, abandonner son existence d’humaine pour devenir le Portail entre les mondes.
Loup était celui qui allait incarner la magie, puisqu’il était la dernière créature occulte vivant sur les terres des contes de fée. Chaperon, qui avait grandi à ses côtés, en était tombée amoureuse depuis bien longtemps. Et pour preuve que ses sentiments étaient réciproques, elle avait les nombreux baisers échangés au cours des nuits passées dans la cabane et toutes ces fois où ils avaient failli fauter et ruiner tout espoir de finir le Rituel. Elle leva lentement ses yeux bleus vers lui et esquissa un sourire timide.
Loup posa sa main sur les cheveux de la jeune fille et la laissa glisser le long de sa joue. Lentement, il baissa la tête jusqu’à poser ses lèvres sur celles de Chaperon. Son autre main glissa vers le corset noir qui serrait sa poitrine. Il tira sur le fil puis défit complètement le lacet, avec une infinie patience. Il releva la tête et plongea son regard dans celui de la jeune fille et s’y perdit. Un éclair vint illuminer la scène.
Prise par la fébrilité du moment, elle enlaça son partenaire et caressa son dos, se laissant aller à la douceur de la luxure. Les lèvres de Loup descendirent le long de son cou et mordillèrent la chair tendre. Puis il l’attrapa par la taille et la souleva avant de la plaquer contre le mur de la masure. Leurs baisers se firent plus passionnés. Loup raffermit sa prise avant de la porter jusqu’au lit et de l’y déposer. Leurs lèvres s’unirent à nouveau pour un long et voluptueux baiser qui laissa Chaperon à bout de souffle.
La main de Loup chercha la fermeture de la jupe et la défit, puis d’un geste vif il tira dessus et la jeta au sol, laissant Chaperon presque nue. Il baisa la bouche, le cou, les seins et le ventre plat avant de mordiller l’intérieur de la cuisse de sa partenaire, lui arrachant un gémissement de plaisir. Les mains de Chaperon caressaient les muscles de l’homme-animal. Les poils de Loup commençaient à se couvrir de sueur. Sa forme changeait sous l’effet de l’excitation : tantôt humain, tantôt garou.
Les dents du loup s’égarèrent sur l’élastique de la culotte, puis sa langue remonta le long de la hanche de la jeune fille lui arrachant de petits cris de bonheur. Impatiente, elle voulait déjà passer à la suite. Des années de préliminaires lui avaient appris tout ce qu’elle avait à savoir sur son corps et sur celui de son compagnon. Loup la retint et laissa glisser sa langue sur la fleur de la jeune fille qui ferma les yeux pour profiter du moment. Des grognements, des petits cris s’élevaient de la couche.
Les chasseurs s’avançaient dans la pénombre grandissante. Le courage qui les avait portés jusque-là commençait à retomber. Mais même ainsi, l’orgueil leur interdisait de montrer la moindre faiblesse. Alors ils avançaient, inconscients du rituel qui allait causer leur perte. La peur remontait le long de leur colonne vertébrale et leur faisait lancer autour d’eux des regards apeurés.
Loup laissa glisser ses doigts sur le dernier rempart qui protégeait Chaperon de ses assauts et remonta lentement le long de son ventre, avant de s’attarder à mordiller son téton. Elle poussa un petit cri de frustration attira son amant à elle. D’une main, elle déboutonna le pantalon et l’abaissa pour caresser l’objet de son désir, qu’elle avait jusque-là senti le long de ses cuisses, long et dur.
Leurs corps étaient couverts de sueur et bougeaient dans un mouvement de va et vient inconscient. Les oreilles de Loup frémissaient. Leurs langues se caressaient, leurs mains se liaient et se cherchaient. Finalement, Loup s’éloigna d’elle pour retirer totalement le pantalon pendant qu’elle arrachait sa culotte pour l’envoyer au travers de la pièce. Elle attendait ce moment depuis si longtemps. Levant les hanches, elle vint à la rencontre de la Magie sous l’œil discret mais impatient des créatures. Enfin, il était en elle. Une vague de douleur l’envahit, et lui arracha un hoquet de surprise.
Une vague de pouvoir explosa autour d’eux, sans qu’ils ne s’en rendent compte. Les monstres, sentant la vie revenir en eux, disparurent d’un seul coup de la pièce.
Loup s’était arrêté, surpris par la réaction de Chaperon. Lorsqu’il en comprit l’origine, il reprit ses caresses et ramena bien vite l’attention de la jeune fille sur leurs ébats.
Alors que le Plaisir montait en eux, un vent surnaturel s’abattit sur tout le Pays des contes de fée. Il ranima chaque entité magique au souvenir des habitants, tout en leur rendant leur existence réelle. Les créatures se précipitèrent dans un hurlement de victoire sur le monde. Le groupe de Chasseur fut le premier touché, car il était très proche de la source de ce bouleversement. La peur distilla son poison et les hommes s’enfuirent dans tous les sens en hurlant. L’un fut attrapé par un ogre qui lui arracha le bras pour le manger. Dans chaque ombre et chaque clair de lune naissait un monstre tendant qui ses bras, qui ses tentacules, qui ses griffes pour dévorer, démembrer ou simplement terroriser sa proie. Dans les lacs, les racines des arbres et les creux des terriers, les fées, gnomes et nymphes revenaient à la vie.
Seul le Chasseur, qui avait eu le réflexe de s’allonger au sol et de rester immobile et insensible aux cris de ses concitoyens, eut la vie sauve. Une fois la vague partie, il se releva et poursuivit son chemin vers l’Est, d’où venaient les créatures.
Les femmes, dans leurs maisons, sentirent le blizzard qui approchait, au-delà des éclairs et du tonnerre. Les enfants se réveillèrent tous en même temps, affolés par d’atroces cauchemars, car proies d’un démon dont la Faim ne pouvait attendre une nuit de plus. Certaines femmes, pensant à tort qu’en s’éloignant de la ville la magie refluerait, commencèrent à faire leurs bagages. Entraînant leurs familles, elles harnachèrent leurs chevaux et empilèrent les sacs pêle-mêle dans les carrioles avant de partir au galop dans toutes les directions.
Peine perdue. Dans l’ampleur du renouveau, les monstres et les démons les poursuivirent elles aussi. Affamés après tant d’années à végéter dans un semi-coma, leur retour les comblait d’une joie féroce et leur donnait bien plus d’ardeur et de puissance qu’autrefois. Ils violèrent les femmes, dévorèrent le cœur battant des enfants à même leurs frêles poitrines. Leurs dents déchirèrent les chairs des vieilles et absorbèrent l’énergie vitale de chacune de leurs proies.
Bientôt, le village fut la proie des flammes qui léchèrent chaque maison, chaque jardin, chaque arbre tout en épargnant pourtant la Forêt. Les cris de terreur s’élevaient ici et là au rythme où les Cauchemars prenaient vie sous l’œil atterré des créatures bénéfiques.
Les fées firent appel aux naïades afin d’éteindre le feu. Les lutins distribuèrent des charmes de chance pour aider les survivants à s’enfuir. Les salamandres tentaient de guérir les plaies et les brûlures avec leurs incantations, mais tout cela était peine perdue. Que pouvaient faire quelques esprits du bien face au déchaînement de la totalité des créatures maléfiques ?
Bien contre Mal, combat éternel. Tel le Yin et le Yang ils sont pourtant indissociables, que ce soit dans la réalité ou dans les contes. Ici, le mal était en train de remporter une victoire. Mais, la guerre ancestrale qui allait reprendre ce soir-là n’était pas terminée. Les forces bénéfiques se retirèrent, concédant la bataille et la ville aux démons. Ils se répandirent eux aussi sur le Pays afin d’ancrer l’espoir dans le cœur de chaque être vivant. Ils se savaient moins nombreux mais tout aussi tenaces.
Autour de la cabane des deux amants, le silence s’était fait. Inconscients du drame qui se jouait si proche d’eux, Chaperon et Loup continuaient leur besogne. Ils étaient heureux de pouvoir enfin concrétiser des années de préliminaires. Ils profitaient de leur bonheur. Puis, la fin arriva. Chaperon se cambra au dessus de Loup. Ils se rejoignirent dans un cri de jouissance.
C’est à ce moment que le Chasseur arriva devant la cabane, attiré et intrigué par la lumière tremblotante face à lui. Silencieux, il se plaça à la fenêtre et jeta un coup d’œil à l’intérieur avant de se baisser vivement. Qu’est-ce que sa fille faisait là, nue et chevauchant un inconnu ?
La jeune fille se laissa retomber sur le coté, heureuse et satisfaite. Pour une fois elle avait laissé tomber le masque. Un sourire sincère sur les lèvres, elle jouait avec une mèche des cheveux de Loup. Celui-ci la tenait au creux de ses bras, un air particulièrement doux sur le visage. Fatigués et couverts de sueur, ils savouraient leur union encore fraîche. Chaperon leva un bras vers le plafond et écarta ses doigts.
– Alors, ça y est ? C’est terminé ? demanda-t-elle d’un ton innocent.
Loup réfléchit un instant, puis il fit glisser sa main jusqu’à celle de la jeune fille. La saisissant, il replia leurs deux bras et les ramena contre son cœur.
– Normalement, oui. Tu es le Portail maintenant. L’immortelle dont le pouvoir est de maintenir la Magie en ce Pays, la Reine des deux Aspects.
Chaperon soupira et se blottit un peu plus contre Loup. Son cœur battait à toute allure. À ce moment-là, un craquement retentit à l’extérieur, ravivant les sens de Loup. Il se leva et sortit dans la nuit. Son regard acéré se porta autour de lui, et il tomba sur le Chasseur à genoux devant la fenêtre, tétanisé. Loup attrapa l’homme par l’épaule et l’amena aux pieds de Chaperon. Celle-ci fronça les sourcils :
– Père ?
– Qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de ma fille ?
– Pardon ? Je suis et je reste ta fille.
– Non. Non… Ma fille connait les Histoires. Ma fille ne coucherait pas avec un inconnu au milieu des bois hantés. Ma fille est pure et innocente. Elle ne pactiserait jamais avec la Magie !
Il avait craché ces mots sur un ton dédaigneux, haineux. Sous l’effet de la colère, Chaperon se dressa devant lui, majestueuse, drapée dans son long drap. La haine l’envahit, tel un poison qui se distille dans les veines.
– C’est ta propre mère qui m’a instruite dans les arts Magiques. La pauvre. Si elle avait su ce que je ferais de son enseignement, elle se retournerait dans sa tombe. Mais au fond, le fanatisme et la haine dans laquelle tu m’as instruite ont fait tout le travail. C’est ta faute si j’ai choisi de réveiller le Mal. Tu m’en as tellement parlé qu’il m’attirait plus que tout.
Le ton froid et détaché de la jeune fille ne contrastait en rien avec son visage fermé et son regard dur. Chasseur s’effondra à cette phrase. Des larmes se mirent à couler sur ses joues. Loup suivait la joute verbale d’un air totalement désintéressé. Lorsque sa maîtresse se tourna vers lui, il haussa les sourcils, attendant la sentence. Elle la prononça en détachant bien les deux mots :
– Tue-le.
La main de Loup s’éleva dans l’air. Ses ongles se changèrent en griffes acérées tandis qu’elle retombait sur la gorge de l’humain. Le sang gicla, éclaboussant une nouvelle fois Chaperon. Elle leva son bras à hauteur des yeux, puis lécha le liquide grenat qui ornait ses doigts. Loup tira le cadavre à l’extérieur, sans un mot. Levant les yeux vers la porte, Chaperon poussa un soupir. La belle assurance qu’elle avait montrée quelques secondes auparavant était envolée. Elle avait accompli la tâche pour laquelle elle avait attendu toute sa vie. C’est avec un soupçon de peur qu’elle murmura :
– Ça y est. La Magie est revenue au Pays des Contes de Fée.