Pierre de vision [quête]

Le jour s'était éteint sur Imladris depuis près d'une heure déja, cependant, point n'était pour moi le moment de retourner a la cité. Effectivement, sur le chemin du retour - après avoir passé une partie de la journée a parcourir les bois au sud de Imladris - j'entendis des pas difficilement attribuables a un elfe ou un cheval. Descendant de ma monture avant de le laisser dans la clairière ou nous nous situions, j'avance a pied vers la direction de ces pas, dégainant mon épée afin de parer a toute attaque fortuite.
Parcourant le peu de distance nous séparant, je parviens a entendre des éclats de voix, et, au travers des broussailles, les formes de mes visiteurs m'apparaissent. Deux trolls, sortant d'une caverne, profitant sans doute de la nuit pour commettre quelque méfait. Mon idée première aurait été de les attaquer ouvertement pour éviter cela, mais, ma dernière rencontre avec deux de leurs cousins m'a appris que seul contre eux, je ne suis pas réellement de taille. La logique voudrait donc que je fasses demi-tour, reprenne mon cheval et chevauche jusqu’à Fondcombe afin de quérir du renfort contre ces monstres. Cependant, je n'aime pas la logique, raison pour laquelle je décide d'attendre que ces créatures se soient éloignées pour pénétrer dans leur caverne. Je ne suis pas sans savoir que les trolls aiment autant ce qui brille que les dragons, et que leur caverne - même si il m'étonnerait qu'ils y soient établis depuis longtemps, la présence de trolls devant difficilement passer inaperçue dans ces régions si peu propices a les croiser - doit recéler nombre de trésors. Cela suffit largement pour que ma curiosité maladive l'emporte sur ma prudence, et que je m'avance en direction de la caverne, écoutant tout de même les alentours, des fois que l'un des trolls eut oublié son baluchon.
M'appuyant d'une main sur la paroi, je passe la tête dans la caverne, n'ayant qu'un coup d'oeil a jeter pour voir que mon intuition était la bonne. La faible luminosité de la lune suffit a se réfléchir sur l'or laissé a la vue de tous, assez peu enfoui au fond de la grotte pour y échapper.

Quelques instants seulement après avoir posé ma main sur la paroi de la grotte, je la retire vivement, me redressant par la même afin de ne pas partir en avant. En effet, je peux sentir une sorte de mucus particulièrement répugnant sur ma peau, et je ne compte pas en identifier l'origine tandis que je tente de me débarrasser des traces que j'en ai sur la main.
De l'eau ruisselle du sommet de la caverne, mais il en faut plus pour me faire reculer, finissant par m'engager franchement sous la roche. Des monticules d'or et de pierres précieuses se montrent a moi, et je songe que certaines personnes adoratrices de ce qui brille auraient pris plaisir a débarrasser cette grotte de son contenu. Cependant, je n'ai que faire de tout ceci.
Continuant mon chemin, retournant du bout de ma botte tel ou tel article afin de m'assurer de son inutilité, je parviens au fond de la caverne, a vrai dire, suffisamment peu profonde pour que je me demande comment ces trolls parviennent a éviter les rayons du soleil en plein jour. Cependant, ce que j'y découvre me fait oublier toute élucubration inutile. Ma vue ne me trompe pas, ce que j'ai devant moi est un squelette, dont je ne peux cependant pas être certain de la nature. Homme ou nain, probablement.
Je m'apprête a faire demi tour quand je vois qu'a son cou se trouve une chaine au bout de laquelle pend une clef. Aux "pieds" de ces ossements, deux coffres. Un elfe plus avisé aurait probablement laissé les choses telles qu'elles étaient, et fait demi tour. Cependant, je me débrouille pour retirer la clef du cou du mort, sans toutefois profaner sa dépouille plus que ne l'ont fait ces trolls. Tentant de faire marcher mon cerveau pour autre chose qu'une idiotie, je regarde la clef, puis les coffres, l'approchant de l'un, de l'autre, tentant de voir auquel des deux correspond cette clef. Me rendant compte que leurs serrures semblent identiques, je m’intéresse de plus près aux caractéristiques de ces coffres, et principalement leur couleur, unique différence entre eux. L'un des deux est brun comme la terre, une couleur parlant obligatoirement a un elfe, tandis que l'autre est d'un rouge sombre. Cela n'est guère mon habitude, préférant la contradiction, mais, pour une fois, je choisirai la logique de tout elfe et décide d'insérer la clef dans la serrure du coffre brun.

Ce coffre doit vraiment être ici depuis aussi longtemps que le squelette qui l'accompagne, car il m'est difficile de l'ouvrir. M'agenouillant au sol pour être a hauteur de la serrure, et donc moins forcer dessus, je tente une nouvelle fois de tourner la clef dans la serrure, avec un demi succès, n'arrivant qu'a a peine un quart de tour. Changeant de position, je sors la clef de la serrure avant de l'y remettre, plus précautionneusement, plus attentivement également. Tournant doucement mais fermement la clef dans la serrure, après quelques accroc, j'entends un déclic plutôt encourageant.
Le coffre est enfin déverrouillé, et je l'ouvre lentement, prenant la peine de m'écarter prudemment. Ne connaissant pas la nature de son propriétaire, je ne compte pas prendre de risque avec un coffre nain piégé, sait-on jamais. Une fois ouvert, je peux voir que le coffre est vide a l'exception d'une sorte de pierre transparente, dont j'approche aussitôt la main. Pour la retirer aussitôt cependant, car, a peine je frôle la surface cristalline de cette gemme qu'elle s'illumine.
J'hésite quelques peu a m'en approcher de nouveau, quand je pense finalement a une autre option, me relevant avant de prendre dans mon sac une pièce de tissu, que j'avais gardé de coté afin de ne pas avoir besoin de craquer une nouvelle tunique en cas ou je devrais songer a un garrot. Laissant d'ailleurs mon sac au sol, je me penche de nouveau vers le coffre et sa pierre, afin de la saisir a travers le tissu. Cependant, alors que je pensais n'avoir aucun mal a sortir cette pierre de son coffre, j'ai beau tirer dessus dans tous les sens, elle ne se déplace pas d'un centimètre. A dire vrai, elle n'en tremble même pas.
J'ose me demander si elle viendrait davantage si je la prenais a main nue - je sens effectivement que cette force m’empêchant de la faire venir a moi n'est en rien naturelle - mais je reste néanmoins méfiant vis a vis de cela.... Pourtant, je ne compte pas abandonner si vite, il est largement dans ma nature de prendre des risques inconsidérés, raison pour laquelle je retire ma main afin de poser le linge sur mon sac avant de l'approcher de nouveau, la laissant suspendue dans le vide a quelques centimètres de la pierre. Je m'interroge a la fois sur cet objet, la raison de sa présence, de son étincellement, si m'en approcher est une bonne idée, mais je sens, sans pouvoir l'expliquer, que cette pierre a plus a offrir qu'une simple pierre. Finalement, sur une dernière inspiration, je me décide a ne pas attendre que les trolls ne refassent leur apparition et prends la pierre a pleine main.

Prenant la pierre dans ma main et forçant dessus pour la libérer, je bascule en arrière avant d'atterrir par terre comme la pierre vient a moi de façon tout a fait légère et naturelle. J'avoue ne m'être pas attendu a cela, raison pour laquelle, d'ailleurs, je me retrouve par terre malgré l'adresse légendaire de mon peuple. Je me relève rapidement, jetant - par réflexe - un regard autour de moi afin de vérifier que je suis bien seul. Cela fait, je lève la main de manière a observer la pierre, écartant les doigts suffisamment pour la voir, mais suffisamment peu pour l’empêcher de tomber. Après l'avoir observée quelques instants, j'en détache cependant ma fascination pour la mettre dans ma poche et récupérer mes affaires. Les trolls peuvent revenir a tout moment, et il n'est guère utile de les attendre sur leur territoire.
Je repars donc sur mes pas, sortant de la grotte avant de m'en éloigner, repartant en direction de l'endroit ou j'ai abandonné ma monture plus tôt dans la nuit. Je m'arrête cependant en chemin pour sortir la pierre de ma poche. La raison en est simple, elle brille d'une lumière peu commune, sensiblement semblable a celle que produisent certains sorts de magicien. La tenant dans ma main, mon regard est irrésistiblement entrainé vers son centre, tandis que d'étranges visions viennent a mon esprit. "Une troupe de nains égarés dans une forêt", "Thranduil interrogeant un nain", "Un village dévasté par un dragon." La pierre s'éteint a la fin de cette dernière vision, et je ne parviens pas a en détacher l'attention tandis que je remet la gemme dans ma poche. J'ai bien vu Thranduil en compagnie d'un nain?! Bon, il y a plus important je crois, sous la forme d'un cracheur de feu, tout de même. Rejoignant ma monture, je me demande si je dois garder cela pour moi ou en parler, au risque de passer pour le dernier des idiots - non, ça c'est déjà le cas, de toute manière. Et, en parler a qui? Mon père? Cela pourrait effectivement être une bonne idée, le seigneur Elrond risquant certainement de mieux comprendre que moi l'implication de ces visions, et leur vérité. Qui me dit en effet que cette pierre ne tente pas de me duper? D'ailleurs, une pierre n'a pas de conscience, ce n'est qu'une pierre...Qui peut bien être derrière celle la? Le macchabée a coté de qui je l'ai trouvée?
Talonnant ma monture, l'envoyant en avant dans un galop effréné a travers les arbres, je reprends la direction de Rivendell, gardant a l'esprit chaque infime détail de ce que j'ai vu, sentant que cela a une importance radicale. Effectivement, si des nains dans une foret et un dragon ne m'avaient pas convaincu, Thranduil s'adressant a un nain, c'est la goutte d'eau provoquant la crue du fleuve!