Shadow is Coming [quête commune Groupe C]

Nellas séjournait en Lothlórien depuis quelques jours et comptait retourner à Imladris le lendemain ou le surlendemain. Mais la veille, les choses avaient pris une tournure tout autre et le chemin qu'elle devait emprunter avait changé. Alors qu'elle était partie pour enquêter à Ost-in-Edhil, concernant des orques qui s'y se seraient établis, ceux-là même qui venaient s'aventurer si près de la vallée cachée, ses pérégrinations l'avait conduite de l'autre côté des Monts Brumeux, près de la Lórien, où elle avait retrouvé Haldir. Du côté d'Elrond et de leurs compères en commun, les choses avaient évolué et pendant ce laps de temps, tout était bousculé. On avait, enfin, décidé de passer à l'action en ce qui concernait le Mage Bleu, les rumeurs qui l'entouraient et ses menaces. Plusieurs éléments en divers lieux s'étaient révélé être relié au Mage Bleu de près ou de loin.

L'on avait reçu des demandes d'aide de plusieurs personnes et on avait décidé de répondre à leur requête. Galadriel comptait se rendre à Fornost où un nomade aurait disparu peu après avoir mentionné le Mage Bleu. L'intérêt de cette disparition était réel, d'autant que, toujours d'après ces nomades, les ruines seraient hanté par un esprit malveillant. Les Seigneurs de la Lórien se questionnèrent alors sur la personne qui accompagnerait la Dame, ne pouvant pas quitter tout deux leur forêt. Nellas se proposa. Elle ne connaissait que très peu la Dame, mais elles venaient du même Âge et s'étaient croisés plusieurs fois pendant les millénaires de leurs vies. De plus, les Seigneurs savaient la confiance d'Elrond envers elle et son efficacité dans tout ce qui impliquait investigation, recherche et aussi discrétion. L'affaire fut convenue et les deux elfes millénaires partirent ensemble dès le lendemain.

On avait prêté une monture à Nellas qui était venue à pied jusqu'à la Lórien. Ça ne dérangeait pas la demoiselle qui n'avait en réalité pas de monture habituellement, bien qu'Elrond lui ai déjà proposé d'en dresser une pour elle. Elle était une laiquendë et lorsqu'ils étaient encore regroupés, et vivants, les elfes verts ne voyaient pas l'utilité des montures, car elles manquaient de discrétion. Monter à un arbre pour se dissimuler était pratique, avec un cheval sellé en bas, la technique perdait clairement en efficacité et crédibilité. Elles finirent par rejoindre la Vieille Route du Sud, traversèrent le pays de Bree puis arrivèrent au pied des Hauts du Nord où Fornost se trouvait. Nellas se tourna vers sa compagne de route. "Si vous me permettez, je serai d'avis d'observer un temps les ruines pour vérifier que rien n'y bouge avant d'y pénétrer ..." Elle n'était pas bien sûr que Galadriel verrait les choses de la même façon, les ruines étant visiblement désertes. Mais les habitudes d'une espionne étaient toujours persistantes.

Je revenais d'une réunion à Imladris avec le Seigneur Elrond, et il était impensable pour moi de partir en mission seule. J'étais donc rentrée, délaissant la magnifique cité d'Elrond avec quelques pincements au cœur, comme à chaque fois que j'en partais. Cet endroit était pour moi comme une seconde maison, un lieu où ma fille s'était sentie bien et où elle avait donné naissance à trois enfants extraordinaires. Une fois chez moi, j'avais expliqué la mission aux gardes et guerriers qui se trouvaient sur place, laissant ceux qui le souhaitaient se proposer, pour finir par me choisir une escorte réduite, composée de Nellas, une des espionnes d'Elrond, et de quelques gardes de la Lorien, qui eux n'auraient à nous accompagner que jusqu'à la limite de mes terres.

Au moment de partir, une frayeur me poussa à me poser une question que je maintenais aux limites de mon esprit depuis un petit moment : devais-je emporter Nenya, l'anneau de pouvoir qui m'avait été confié aux confins des âges durant ce voyage ? Celeborn, voyant mon regard bleu posé sur cette bague que je ne quittais jamais, un air certainement inquiet sur le visage, se contenta de poser sa propre main sur la mienne et de poser un baiser sur mon front, me rassurant, comme à chaque fois qu'il faisait ce geste lorsque j'étais perdue dans mes pensées noires. Nenya m'accompagnerait, et je comptais sur Nellas pour m'aider à le protéger. Je ne savais si le Mage Bleu voulait l'anneau unique ou l'un des anneaux de pouvoirs confiés aux Elfes, aux humains et aux nains. Ceux des humains étaient perdus, portés par les ombres du mal, enfermées elles mêmes dans des catacombes scellées de magie. Ceux des nains, quatre sont perdus, et les autres ont été refusés par Dain II, il y a une centaine d'années, et donc toujours en possession de Sauron le maléfique. Quant à l'unique, il était perdu depuis des siècles.

On avait confié à Nellas une de nos meilleures juments, et j'avais pris ma fidèle compagne depuis quelques années : Tinùviel, magnifique créature au poil noir et uni. Je m'étais équipée non pas d'une des robes simples que j'aimais porter la plupart du temps, mais d'une tunique de voyage, d'une cape chaude et de mon arc. J'avais aussi pris des dagues, au cas où.
Le voyage fut aussi monotone et ennuyeux que tous les voyages. Et puis, nous simmes arrivées près de Fornost, où Nellas pris la parole pour la première fois. Je tournais la tête vers elle, l'inclinant avec un sourire.

- Oui, il vaut mieux observer ce qu'il se passe pour ne pas se faire surprendre. Soyons prudentes. Nous ne sommes que deux, là où nos ennemis peuvent être bien plus nombreux que nous.

Je regrettais presque de ne pas avoir emmenée d'escorte plus nombreuse. Il flottait ici un parfum de danger que je n'appréciais pas du tout.

Les bâtiments lugubres de Fornost me donnaient la chair de poule, au sens littéral du terme. Je ne savais pas trop pourquoi, mais il régnait ici une atmosphère de mort et de terreur. Autrefois, j'étais venue ici, alors que c'était une cité prospère et florissante, mais elle n'avait plus rien à voir aujourd'hui avec ce que j'avais connu il y a quelques milliers d'années. Je ne pouvais m'empêcher de m'attendre à croiser un visage connu, un marchant ambulant, ou quelqu'un, alors qu'aux ruines se superposaient dans mon esprit les souvenirs de ce passé.

La neige tombait autour de nous, rendant le calme apparent de l'endroit tout à fait pesant, là où dans d'autres cités, les flocons blancs auraient émerveillé n'importe qui. Je laissais mon regard dériver un instant sur le sol, et j'aperçut des traces de pas qui semblent mener quelque part.

- Allons voir

Le son de ma voix me donnait l'impression de se répercuter sur les bâtiments sombres, et machinalement, je me recroquevillais sur moi-même, avec cette sensation tenace que je venais de réveiller les fantômes de ces lieux. Néanmoins, je ne restais pas en place, guidant ma fidèle pouliche vers les traces, puis les suivant durant quelques minutes, jusqu'à une grande bâtisse où ils semblaient disparaitre.

L'homme que nous devions retrouver se cachait-il es intempéries là dedans, ou bien un grand danger nous attendait-il ? Je ne pouvais pas le savoir de cette manière, et la seule chose qu'il y avait à faire pour le moment était de descendre de cheval pour aller voir tout ça de plus près, chose que je fis sans attendre, imitée par ma garde du corps.

- Pensez-vous qu'il puisse s'agir d'un piège ? Ces ruines ne me disent rien qui vaillent, et je ne vois aucune lumière dans le corps de garde.

Il me semblait tout du moins que nous étions devant l'ancien corps de garde de Fornost. Je me demandais si ces ruines étaient désormais aux prises d'un nouveau mal, après que le premier roi-sorcier ait vaincu les défenses de l'endroit il y a de ça si longtemps. J'avalais ma salive avec quelques difficultés, inquiète, tant pour moi que pour Nellas, et c'est avec apréhension que je m'approchais de la grande porte pour la pousser. Elle s'ouvrit dans un grincement qui réveilla toutes les chauves-souris du coin, les faisant sortir en trombe devant nous. Je me protégeais le visage le temps que la vague passe, puis j'avançais dans la pénombre, cherchant du regard un morceau de bois qui pourrait nous faire office de torche.

Une fois la vague de chauve souris passée, j'entrais la première dans la bâtisse, et je trouvais une torche éteinte sur le mur, que j'allumais avec un peu d'amadou. La lumière envahit l'espace, et je pus découvrir que la poussière et la désolation s'était infiltrés jusqu'ici. Les rares meubles encore sur place étaient démolis, mangés par la moisissure et les mites. Peut être était-ce la neige, peut être était-ce autre chose, mais il n'y avait aucun son. On se serait cru dans un endroit désertique où il n'y avait rien sur des kilomètres aux alentours. Mais, nous étions dans un ancien corps de garde, visiblement désert. J'entendais le son de mes pas, léger, et celui de la tunique de Nellas qui bougeait alors qu'elle tournait sur elle-même dans mon dos.
De temps à autre, un craquement sonore se faisait entendre dans la charpente, nous faisant sursauter. L'ambiance était clairement lugubre. J'ai de plus en plus l'impression que quelque chose cloche, ici, que je suis soumise à nouveau à l'un de ces sortilèges étranges qui semblent régner sur certains lieux de la Terre du milieu.
- Au secours… ARrrrgh
Le cri me fait accélérer, arrivant face à deux escaliers. L'un descend, l'autre monte. Les deux sont vermoulus, et il me semble totalement impossible de monter ou de descendre. Je finis néanmoins par poser le pied sur la première marche de l'escalier qui monte. Celui-ci grince tout ce qu'il peut, alors que je continue lentement mon ascension, espérant que le bois tiendra assez longtemps pour que j'arrive en haut entière. Dans mon dos, Nellas a suivit le mouvement. Je pose enfin le pied sur la toute dernière marche, le cœur battant, incapable de décider dans quel sens aller. Le long couloir part d'un coté comme de l'autre, et il n'y a a nouveau aucun bruit.

A chaque pas qui m’emmène vers le haut de l’escalier, je sens que je n’ai pas fait le bon choix, comme les cris semblent s’éloigner, et qu’il y a de moins en moins de bruit autour de nous. Cependant, je ne sais réellement pourquoi une force invisible – mon instinct ? – me pousse à aller en avant, et à monter jusqu’en haut de cet escalier. Et, après quelques pièces visitées et vides, nous trouvons quelque chose qui semblait être digne de notre visite ici. Je commence par prendre le coupe pour sentir l’odeur du liquide couleur vermeil qu’elle contient, mais l’odeur n’est rien de reconnaissable à mes yeux. Je décide donc de prendre le contenu du verre, ainsi que le reste des objets afin de pouvoir les examiner en toute liberté une fois de retour en Lorien. Le libre et le vase prennent place dans mon sac, et je jette par terre le contenu de ma gourde pour transvaser avec beaucoup de précautions le liquide de la coupe dans la gourde. Une fois ça fait, la coupe prend elle aussi place dans mon paquetage.
- On dirait que nous avons choisi le mauvais chemin
Je me tourne vers ma compagne. Nous pourrions visiter toutes les autres pièces de l’étage, mais j’ai comme l’impression que nous ne trouverons rien de plus ici. Je désigne alors la sortie, et propose à Nellas de descendre avec moi, afin d’aller au sous sol pour voir ce qu’il s’y trouve. Cependant, un craquement sonore arrête nos pas, et nous finissons par échanger un regard inquiet en entendant le bruit de planches se fracassant sur le sol. Après quelques secondes d’incertitude, nous nous dirigeons vers l’escalier, dont une partie s’est effondrée après notre passage, et il va s’avérer très difficile de redescendre ainsi. Enfin, ça l’aurait réellement été si nous avions été des humaines et non des elfes : notre adresse et notre agilité naturelles vont ici grandement nous aider.
Je pose le pied sur la première marche, encore entière, puis je m’agrippe à la balustrade, qui elle aussi semble avoir résisté aux appels du temps. Mon pied vient se poser entre deux planches, et c’est ainsi que je passe le premier trou, qui semblait faire environ six marches de hauteur, avant de descendre quatre nouvelles marches sans danger, et de recommencer la manœuvre pour un second trou. Mon pied passe au travers de la marche vermoulue, cette fois ci, et je dois continuer mon escalade à l’envers pendant encore quelques mètres avant de trouver une marche qui soutienne mon poids, et celui de ma compagne.
Après quelques hésitations, dues à l’état de l’escalier qui descend, et à la peur de nous retrouver dans l’incapacité de remonter, nous décidons d’attacher une corde en haut des marches, pour pouvoir nous hisser si besoin s’en fait ressentir, lorsque nous remonterons, puis nous descendons les marches, à la recherche encore une fois de cet homme que nous aurions du trouver depuis un petit moment déjà.